L’appel de 200 hommes mâles des arts, du spectacle et autres lieux réservés aux gens bien, émus par les faits terribles révélés par l’affaire Pélicot, est tout à la fois indécent et grotesque.
Indécent parce qu’ils saisissent un drame terrifiant pour le rabattre sur la « domination masculine » en général. Droguer sa femme pour la faire violer par une cinquantaine d’abrutis recrutés par petites annonces, ce n’est tout de même pas comme mettre une main au fesses ou siffler une fille dans la rue. Le vocabulaire de la « domination » archi-usé par les « intersectionnels » de tous poils, montre une fois de plus qu’il n’a aucune fonction critique, mais sert à tout mélanger et à interdire le jugement. La conséquence, non voulue, on l’espère, de cette confusion, c’est que si tout se vaut, rien ne vaut. Et donc, ce qu’a subi Gisèle Pélicot est réduit à toutes les manifestations de « machisme » et on instille l’idée atroce que « ce n’est pas si grave que ça. »
Grotesque parce que le passage central de cet appel nous
gratifie de tous les poncifs de la sociologie branchée : « Dire
'tous les hommes', c'est parler de violences systémiques perpétrées par tous
les hommes, parce que tous les hommes, sans exception, bénéficient d'un système
qui domine les femmes. Et puisque nous sommes tous le problème, nous pouvons
tous faire partie de la solution ».
Le mot « systémique », ça en jette ! Mais de
quel système parle-t-on ? La violence contre les femmes n’est-elle
pas punie par la loi ? Le harcèlement
sexuel – pratiqué largement semble-t-il dans les milieux de certains signataires
– est-il admis comme une chose normale ?
On reconnaît aujourd’hui qu’un mari peut violer son épouse qui n’est pas
contrainte de subir « le devoir conjugal » et le viol est un
crime,punissable de 15 années de réclusion. Où est donc le système ?
Ajouter que « tous les hommes » perpètrent des violences contre les
femmes, c’est une essentialisation particulièrement odieuse. Les signataires de
cet appel ont peut-être l’habitude de frapper leurs compagnes, de ne pas lever
leurs fesses de leur chaise au moment du repas, de ne jamais faire le ménage,
ni la lessive… Mais ils n’ont aucun droit de prendre leur cas pour une
généralité ! Ajouter que « tous les hommes sans exception bénéficient
d’un système qui domine les femmes », c’est vraiment dire n’importe quoi. Les
nounous immigrées des quartiers chics sont des femmes opprimées par les hommes …
et par les femmes riches. Les femmes de ménage des grands hôtels sont opprimées
par les patrons de ces hôtels, mais pas par les hommes qui sont en cuisine.
Mais suis-je bête, le système ce n’est pas la domination de
classe, c’est la domination masculine qui permet à ces acteurs friqués de venir
donner des leçons à « tous les hommes sans exception. On ne parlera
donc pas des lieux bien connus, ici et ailleurs, où la violence contre les
femmes est bien « systémique ».
Puisque les violeurs de Mazan sont « monsieur tout le monde »,
circulez !
Il y a derrière tout cela une des manifestations
particulièrement écœurantes de la société du spectacle. Un spectacle monté pour
masquer la réalité et dans lequel les spécialistes du spectacle peuvent se
donner en spectacle. On ne posera donc pas les questions qui pourraient fâcher
et mettre un bon coup dans la fourmilière spectaculaire, des « sites de
rencontres » aux « clubs libertins » en passant par la
sexualisation de l’école et l’exhibition de la vie intime. Bref, il faudrait
mettre en cause le « sans tabou » que toutes ces belles gens
promeuvent qui a finit par tout banaliser, y compris l’horreur.
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