mardi 1 janvier 2008

Comprendre Marx (recension)

recension de Jean-Guilllaume Lanuque ("Dissidences")

Denis COLLIN, Comprendre Marx , Paris, Armand Colin, collection « Cursus », 2006, 256 pagesAvril 2007*
Professeur de philosophie en lycée, ancien élève de Pierre Broué, Denis Collin s'était récemment signalé par la publication de Revive la République ! en 2005. Avec cet ouvrage destiné à un large public, et écrit dans un style riche, il souhaite revenir sur la pensée de Karl Marx, philosophique en particulier, interroger les contradictions d'une pensée en mouvement, critique et inachevée ; et le moins que l'on puisse dire, c'est que certaines de ses analyses ne devraient pas manquer de susciter la discussion.
Après un aperçu biographique, dans lequel Denis Collin liquide le supposé antisémitisme de Marx – accusation anachronique selon lui –, il rappelle à travers les œuvres la progressive critique de la philosophie idéaliste puis de l'économie politique. A cet égard, il relativise la rupture avec la philosophie de Hegel, les phases d'attraction et de répulsion de Marx à son égard s'étant succédées tout au long de sa vie. De même, il estime mineurs les Manuscrits de 1844 , et considère le remplacement ultérieur du concept d'aliénation, qui y figure, par celui d'exploitation, comme un progrès, une vue plus totalisante du mode de production capitaliste. Plus iconoclaste, il relève dans L'idéologie allemande la défense par Marx de l'individu réellement existant, l'opposant ainsi à Lénine et à son idéalisation de la « conscience de classe extérieure », qui serait ainsi davantage dans la lignée d'un Stirner. Partant de ce constat, il considère que Marx, loin de rechercher des lois de l'histoire, sinon au détour d'une polémique, défendait plutôt une histoire faite par les êtres humains, et donc non écrite à l'avance. De même, en dehors du mode de production capitaliste, Marx, ainsi que le remarque bien Denis Collin, n'a pas élaboré de définitions précises des autres modes de production.
En fait, c'est à un véritable nettoyage de la pensée marxienne, dans la lignée d'un Maximilien Rubel, que Collin se livre, la dissociant de bien des marxistes, comme lorsqu'il considère le « matérialisme dialectique » en tant que transformation en idéologie de la réflexion de Marx, et qu'il préfère voir dans Le Capital , plutôt qu'un exposé des lois de l'évolution des sociétés, une « philosophie économique ». De même, il souligne le flou des définitions des classes chez Marx, revenant généralement au plus petit dénominateur commun (prolétaire = salarié, par exemple), balaye le concept de conscience de classe, qu'il considère là aussi comme non marxien, et privilégie comme objectif, plutôt que la « dictature du prolétariat », l'association des producteurs comme vecteur du passage au socialisme, dans la lignée d'un Saint Simon. Les développements sur l'analyse du capital, de la plus value ou de l'analyse de la marchandise sont plus classiques, et ceux qui sont consacrés à la nature de l'Etat relativisent son analyse comme strict instrument des classes dominantes au profit d'une certaine autonomie reflétant les rapports de force entre classes, une vision a priori moins hétérodoxe que les précédentes. Qualifiant cette analyse de l'Etat par Marx de « point aveugle » de sa pensée, il en trouve la validation dans l'échec des révolutionnaires russes à mettre en application les leçons tirées du marxisme, aboutissant à l'inverse de l'idéal.
Quant à l'horizon communiste, Denis Collin plaide pour évacuer le « radicalisme verbal » dont faisait parfois preuve Marx pour définir des perspectives plus « raisonnables », avec justement la nécessité permanente, selon lui, d'un Etat, y compris post-capitaliste. Il estime néanmoins nécessaire de rester fidèle au communisme de Marx, mais en le « reformulant » aux conditions de notre temps. Ainsi, il considère que le rôle révolutionnaire attribué à la classe ouvrière a été contredit par l'histoire du XXème siècle. Un ouvrage qui suscitera nécessairement la discussion, voire la polémique, comme tant d'ouvrages antérieurs d'autant d'exégètes, qui souhaitaient tous « réactualiser », « reformuler » voire « refonder » le marxisme.
Jean-Guillaume Lanuque. (publié sur "Dissidences")
Mardi 1 Janvier 2008

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