Philosophiquement, je suis athée. Dieu est une hypothèse
inutile pour qui suit la raison. Sauf si on appelle Dieu ce que les Grecs
appelaient l'Être et qu'on pourrait appeler le réel, qui existe nécessairement,
est éternel et absolument infini, omniprésent et tout-puissant... Mais cela n'a
aucun rapport avec le Dieu transcendant des religions abrahamiques. Si on
voulait chipoter d'ailleurs on pourrait tirer une certaine interprétation
du Dieu biblique vers autre chose – voir Athéisme dans le christianisme d’Ernst
Bloch.
Politiquement, je suis partisan de la laïcité, la laïcité
sans adjectif qualificatif, la séparation absolue de la sphère privée de la foi
et de la sphère publique. Si l’on entend par religion le « fait social
total » analysé par Durkheim, la laïcité est « antireligieuse puisqu’elle
dénie à la religion sa vocation traditionnel d’organisation de l’espace public,
d’organe régenté les conduites des hommes, d’institutions sacralisant les grands
moments de la vie (naissance, mariage, mort). La laïcité est sous cet angle,
anticléricale. Et donc, ceux pour qui la religion n’est pas la foi mais l’ordre
social, ceux-là se sentent sans doute brimés par la laïcité, ils la trouvent « liberticide »,
bien que le cléricalisme ne reconnaissant pas le principe de liberté de
conscience des individus n’est aucunement fondé à réclamer pour lui-même l’application
d’un principe qu’il ne reconnait pas. Mais si au contraire de l’institution
religieuse, on entend par religion (comme dans l’expression « avoir de la
religion) la foi, toute subjective, c'est-à-dire un ensemble de règles de vie
et une manière que chacun trouve pour s’arranger avec la mort, la laïcité admet
toutes les religions et tous les religieux sincères peuvent parfaitement être
laïques. Plus : s’ils tiennent vraiment à leur foi, ils doivent désirer qu’elle
soit pure de toute intrusion politique. Rendre à César ce qui est à César et à
Dieu ce qui est à Dieu, voilà la bonne règle. Dès lors on peut être un musulman
laïque, un chrétien laïque, un Juif laïque et un athée tout aussi laïque.
Rappelons d’ailleurs que les athées ne sont pas, loin de là, les seuls acteurs
qui ont permis les lois laïques en France : protestants et Juifs y ont
pris toute leur place et on trouvait même des catholiques à la Libre Pensée.
Tout cela est assez simple, finalement. Où les choses se
compliquent c’est quand on y mêle d’autres considérations. Il va de soi que l’universalisme
républicain dont je me réclame est universaliste et donc le racisme est
évidemment impensable dans ce contexte. Mais on ne doit pas appeler « racisme »
n’importe quel type d’animosité à l’égard d’un groupe humain. Traditionnellement,
les militants ouvriers n’aiment pas particulièrement le patronat. Font-ils preuve
d’un racisme « antipatrons » ? Nullement ! On peut même
être ami à titre personnel d’un patron sans renoncer à son animosité contre le
patronat. Je n’aime pas spécialement l’Église catholique ni son Pape, devenu
une vedette de la « gauche », mais je n’ai rien contre les chrétiens
en général et beaucoup de mes mais embrassent cette foi respectable. Je n’ai
aucune dilection pour l’islam mais je n’ai rien contre les musulmans, parmi
lesquels je compte un certain nombre d’amis. L’universalisme laïque refuse
toute discrimination envers les individus en raison de leur foi, mais se
réserve évidemment le droit absolu de critiquer toutes les religions !
Que des questions aussi simples soient devenues incompréhensibles
en dit long de la décomposition de l’ethos républicain dans notre pays.
Le refus de voir une religion en particulier empiéter sans cesse sur l’espace
public, imposer ses règles ségrégationnistes contre toute la décence commune sur
laquelle repose la communauté politique est maintenant assimilé à du racisme !
Et d’éminents membres de la « gauche » apportent leur caution à cette
imposture. C’est à désespérer de tout.
Texte Lumineux qui malheureusement n'interpellera pas nos "religieux" prosélytes. Le plus troublant étant sans doute que le mot religion signifie "qui relie les hommes entre eux" Dans la pratique nous pouvons constater qu'elles relient effectivement des groupes pour faire la guerre aux autres groupes qui militent pour d'autres visions toutes aussi hypothétiques. Et Dieu dans ce bordel sanglant? Si j'étais Lui, j'en perdrait la foi.
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