Affichage des articles dont le libellé est philosophie morale. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est philosophie morale. Afficher tous les articles

samedi 3 avril 2010

Un si fragile vernis d'humanité

Un livre de Michel Terestchenko

Michel Terestchenko, Un si fragile vernis d’humanité. Banalité du mal, banalité du bien (La Découverte, 2005, collection « Recherches - MAUSS ». ISBN 2-7071-4612-9) : Voilà un livre philosophique bien impur qui mêle l’analyse des doctrines morales classiques (La Rochefoucauld, Hutcheson, Shaftsbury, Kant, Sidgwick, Lévinas), le récit et le témoignages historiques (Franz Stangl, le chef du camp d’extermination de Treblinka, le couple Trocmé et des habitants du Chambon-sur-Lignon, Giorgio Perlasca, sauveur des Juifs de Budapest) et les compte-rendus des travaux de psychologie expérimentale (la fameuse expérience de Milgram sur la soumission à l’autorité, l’expérience de la « prison de Stanford », etc.). Le propos de l’auteur est cependant parfaitement clair. Il s’agit de réfuter l’opposition égoïsme/altruisme comme problématique fondamentale de la philosophie . Les « moralistes » classiques qui ramènent toutes nos conduites – y compris celles qui sont en apparence les plus altruistes – à l’égoïsme et à l’amour-propre qui ne se confond pas avec les intérêts matériels. L’auteur souligne que cette thèse est d’une part l’une des plus faciles à accepter – car tout le monde trouve normal et naturel de rechercher son bien propre – et en même temps l’une des plus infalsifiables au sens poppérien du terme. À l’opposé, il est impossible de faire du comportement absolument désintéressé, du sacrifice total de soi, le prototype du comportement moral. Ce qui intéresse l’auteur, ce sont précisément tous ces cas où se mêlent altruisme et égoïsme, en proportions variables. L’un des intérêts de l’ouvrage de Terestchenko est qu’il montre combien les comportements moraux sont inséparables de la manière dont les individus sont insérés dans des relations sociales déterminées – Franz Stangl et André Trocmé sont tous deux des croyants. Mais le premier veut faire carrière, il entre dans la police autrichienne et se fait ensuite admettre au service des nazis après l’Anschluss et finira, sans l’avoir vraiment voulu, parce que, dit-il, il ne pouvait « pas faire autrement », comme l’un des grands criminels nazis, responsable direct, en un an et demi, de la mise à mort de 900.000 personnes (l’estimation basse donne 2000.000 de Juifs gazés à Treblinka entre 1941 et 1943). Trocmé devient pasteur et défenseur de la non-violence et à la tête de la  du Chambon-sur-Lignon – un village des Cévennes, majoritairement protestant – il va organiser le sauvetage de plus de 5000 Juifs. Mais l’auteur refuse cependant tout déterminisme social, même si le type d’éducation, la manière dont les valeurs morales sont transmises, jouent un rôle essentiel.
Montrant comment les grandes doctrines morales classiques (tant l’impératif moral kantien que l’utilitarisme de Sidgwick) sont impuissantes à définir véritablement ce qu’est la moralité et à en comprendre les ressorts, l’auteur substitue à l’opposition égoïsme/altruisme l’opposition entre l’absence à soi et la présence à soi. L’individu obéissant qui devient un tueur de masse (comme dans l’histoire du 101e bataillon de réserve de la police allemande, l’un des groupes les plus tristement célèbres de la « shoah par balles ») est un individu absent à soi. Il est déterminé par les circonstances et s’y laisse porté. Le « juste », celui qui ouvre sa porte au persécuté parce qu’il ne pouvait « rien faire d’autre », n’a pas réfléchi préalablement à ce que la raison dictait (soit en  de l’impératif catégorique, soit en  du principe d’utilité). Il ne se laisse pas porter par le circonstances.
La lecture de Michel Terestchenko pourrait éclairer et être éclairée à la lumière de Hegel. Présence à soi et absence à soi, c’est bien une autre manière de formuler le concept d’aliénation comme « Entfremdung ». Dans sa critique des morales abstraites enracinées dans le sujet pur, on pourrait retrouver aussi la critique hégélienne de l’abstraction de la Moralität et la défense d’une  spontanée, enracinée dans l’éducation et l’ethos social, ce qu’est la Sittlichkeit qui va bien au-delà de la légalité abstraite.

vendredi 20 décembre 2002

Études matérialistes sur la morale. Nietzsche, Darwin, Marx, Habermas par Yvon Quiniou, Kimé, 2002; 19€


Il y a quelques années, Yvon Quiniou publiait une stimulante lecture matérialiste de Nietzsche, Nietzsche ou l’impossible immoralisme (Kimé, 1993). Ses Études matérialistes sur la morale qui viennent de paraître chez le même éditeur synthétisent une recherche qu’il poursuit patiemment, à l’écart de la doxa, pour construire une conception matérialiste de la morale. Il y a un fil directeur dans sa réflexion : l’affirmation de la valeur scientifique du matérialisme, un matérialisme modeste et non métaphysique, celui qui considère toute réalité connaissable humainement comme une seule réalité matérielle, dont le travail scientifique peut expliquer les lois de transformation, de l’apparition des organismes vivants jusqu’à l’homo sapiens. Cette conception strictement moniste exclut tout recours à la transcendance divine. À partir de là, se pose la question cruciale que développe l’auteur : comment la morale est-elle possible d’un point de vue matérialiste ? Se situant sur le plan de la nature, considérée sans adjonction extérieure, le matérialisme semble exclure comme simple mystification tout «devoir-être». N’est-ce pas le matérialisme nietzschéen qui se proposait de «fracasser la morale» comme illusion de la vie ? Yvon Quiniou montre qu’en réalité l’immoralisme nietzschéen se tourne en un moralisme nouveau qui fait l’apologie de ce qu’il appelle les «valeurs de la vie».
Yvon Quiniou reprend à son compte une distinction entre morale et éthique qu’ont opérée plusieurs auteurs contemporains. L’éthique a son «origine dans la vie» et ses valeurs sont donc subjectives, concrètes, individuelles, purement facultatives – «personne n’est obligé de préférer le plaisir au déplaisir» – et elles ne peuvent être un objet de connaissance – l’éthique peut seulement être expérimentée. Au contraire, la normativité morale demande que les valeurs morales se laissent appréhender par «quelque chose comme la raison pratique». Elles sont abstraites (formelles), universelles et obligatoires. Si un matérialisme peut aisément concevoir la possibilité d’une éthique, la morale est plus problématique. Il s’agit donc, d’une part de rendre compte de la possibilité de la morale d’un point de vue matérialiste et d’autre par de la fonder rationnellement.
Ses études sur Darwin, spécialement sur La descendance de l’homme, montrent que la théorie de l’évolution rend très bien compte de l’apparition de la morale comme un instinct social qui s’est révélé un avantage adaptatif décisif pour la survie de l’espèce. Mais expliquer la genèse de la morale, ce n’est pas encore la fonder rationnellement comme système normatif. S’appuyant sur les travaux de Patrick Tort, Yvon Quiniou montre que les diverses variétés de darwinisme social, jusqu’à la sociobiologie n’ont pas de légitimité à se réclamer de l’héritage darwinien. Pour Darwin, en effet, l’apparition de l’homme, si elle est un produit des lois de la sélection naturelle, marque un tournant dans la manière dont ce processus s’opère. C’est désormais par la vie sociale et par la culture, que l’homme s’adapte à la nature et adapte la nature à ses besoins. Le «saut» évolutif permet de comprendre l’émergence du normatif.
Yvon Quiniou dégage l’interprétation de Marx de la double ligne à la fois scientiste et politiciste qui a été dominante dans la culture marxiste. Cette culture voit dans la morale une idéologie et la raison humaine est conçue comme seulement «pragmatique» ou «techniquement pratique». L’auteur oppose à cette tradition une version non métaphysique de la morale kantienne – une «morale sans Sujet». Sans sujet parce que matérialiste, cette morale se refuse à tenir l’individu pour une cause libre. Comme le dit Marx dans la Sainte Famille, «si l’homme n’est pas libre au sens matérialiste (…) il ne faut pas punir le crime dans l’individu mais détruire les foyers antisociaux du crime». Mais c’est une morale, car le projet communiste repose sur des valeurs universelles et obligatoires. En tant qu’idéal d’émancipation, le communisme ne s’oppose donc pas à la morale kantienne, mais en constitue le complément pratique sans lequel elle reste une pure proclamation de principe. Il suffit de lire Marx pour voir que son étude scientifique du mode de production capitaliste est pénétré de part en part de ce que Jean Granier nomme le «pathos valoriel» et qu’en définissant son œuvre comme «critique» Marx admet implicitement son caractère normatif : «il n’y a de critique véritable qu’à partir d’une valeur présupposée qui constitue la matrice du jugement porté sur le réel», fait remarquer Yvon Quiniou. Ainsi la critique de l’exploitation est parfaitement compatible avec un traitement moral kantien : l’exploitation n’est, par définition, pas universalisable ; elle considère les individus uniquement comme des moyens (des «ressources humaines» !) et non comme des fins en soi ; enfin, elle produit une situation radicale d’hétéronomie dont les ouvriers ne peuvent partiellement s’émanciper que par la lutte. Certes, la critique de Marx n’est pas uniquement morale, mais s’appuie sur une compréhension de la dynamique historique. Mais c’était déjà vrai pour Kant dont la morale ne peut guère être comprise complètement sans la philosophie de l’histoire et la théorie du droit.
Il était presque naturel que cette tentative de repenser Marx à la lumière de la morale kantienne (et du même coup Kant à la lumière d’un projet de l’émancipation humaine) débouchât sur l’examen de la philosophie de Habermas. Yvon Quiniou ne cache pas son admiration pour l’héritier de l’école de Frankfort qui a su clairement à la fois distinguer et articuler morale, éthique et politique. La théorie discursive de la morale (l’éthique de la discussion) en fondant la normativité sur les présuppositions théoriques de la communication sociale rend possible théoriquement ce kantisme sans sujet transcendantal et ancré dans la vie sociale. Elle permet surtout de redonner sa place au politique. Car c’est bien dans le politique que se constituent les normes, même si la morale est fondatrice en dernière instance.
L’étude consacrée à Habermas est brève, mais elle met le lecteur «en appétit». Quoi qu’il en soit, après des décennies de stalinisme, après l’engloutissement de Marx sous les décombres du «socialisme réel» et la vague néolibérale, Yvon Quiniou s’inscrit dans un courant qui veut renouer le fil de la pensée émancipatrice. Alors que les doctes ne nous proposent que des injections de «moraline» pour apaiser les maux engendrés par une société vouée à l’utilitarisme débridé, il dessine les grandes lignes d’une synthèse entre la tradition humaniste classique, dont Kant est un des sommets, et l’analyse scientifique, lucide, des processus sociaux et politiques. Un livre donc à ne pas manquer.

Denis Collin

samedi 10 novembre 2001

Sur l'objectivité des valeurs éthiques

 Le 11 septembre 2001, nous avons sans doute vu une nouvelle et terrifiante illustration de ce que Max Weber entendait par la " guerre des dieux ". Tant l’élargissement de notre cadre de vie que l’affaiblissement de l’autorité des religions et la " multiculturalisation " de nos sociétés nous confrontent à cette question : y a-t-il des valeurs éthiques qui puissent s’imposer à tous afin de maintenir la possibilité d’une vie commune acceptable ? Il n’y a pas si longtemps, les chrétiens pensaient que tuer et mourir pour sa foi étaient des manifestations d’un comportement éthique exceptionnel. Et les ordres mendiants fournissaient de redoutables et cruels inquisiteurs. Ainsi, les fanatiques de confession islamique ne nous sont point étrangers. S’ensuit-il que nous devions considérer notre conception des hommes comme individus libres et égaux seulement comme une conception éthique parmi d’autres, une conception définitivement ancrée dans la subjectivité de " l’homme occidental ", sans valeur en dehors de cet horizon ?

L’exaltation de la subjectivité, de l’individu-roi, pour reprendre une des expressions favorites de Pierre Legendre, semble conduire directement à ces conclusions relativistes et en fin de compte à une sorte de nihilisme moral. Inversement, penser qu’il y a une objectivité des valeurs éthiques – ou du moins de certaines d’entre elles – conduit à admettre que certains principes de vie s’imposent à tous, de manière universelle, y compris contre les formes particulières de la vie éthique de telle ou telle communauté. Nous pensons que le respect de l’intégrité physique des personnes fait partie des principes les plus fondamentaux inclus dans " les droits universels de l’homme " et c’est pourquoi, en dépit de quelques formidables régressions au XXe siècle, la torture est condamnée comme moyen légitime d’investigation judiciaire. Pourtant, certains groupes considèrent l’excision comme une pratique normale permettant à la jeune fille d’entrer dans la vie adulte comme femme. Dans cette pratique, le psychanalyste reconnaîtra sans peine la terreur masculine exacerbée devant la sexualité féminine. Mais la psychanalyse n’a pas vocation normative. Devons-nous alors admettre que les valeurs éthiques qui posent que les femmes ne peuvent devenir femmes qu’en étant privées de la possibilité de jouir ont les mêmes droits à faire valoir que les valeurs d’égalité et de droit au bonheur, proclamées par les déclarations américaine et française dès la fin du XVIIIsiècle ? C’est ce qu’ont soutenu les courants se réclamant de l’ethnopsychiatrie à la Tobie Nathan. Il est curieux de constater que le relativisme, affirmant la primauté de la subjectivité et l’équivalence de toutes les valeurs, conduit ainsi à la soumission à la tradition, même la plus cruelle et la plus obscurantiste.

On pourrait sortir de cette contradiction en trouvant un moyen de démontrer qu’il existe des valeurs éthiques objectives. Comme on ne peut plus guère s’en référer à l’autorité religieuse, celle de la raison devrait nous offrir une bonne solution, s’il y en a une. Il suffirait alors de mettre ses pas dans ceux de Kant. Les Fondements de la métaphysique des mœurs montrent justement que ni la tradition, ni l’autorité religieuse, ni les motivations utilitaires ne peuvent assurer un fondement à la moralité. Cela est évident pour la tradition et l’autorité religieuse, mais, pour Kant, il en va de même des principes utilitaristes. Si l’utilitarisme est une morale guidée par la recherche du bonheur, alors, comme " chacun voit midi à sa porte ", chacun a sa propre conception du bonheur et donc une morale fondée sur le principe du bonheur ne serait qu’un empilage de préceptes contradictoires. L’un affirmera que l’ascétisme est la condition d’un bonheur durable alors que l’autre démontrera qu’il suppose un minimum de confort matériel ; l’un verra dans le loisir le vrai bonheur alors que l’autre posera que c’est seulement dans le travail que l’homme se réalise et trouve son bien propre. Si l’utilitarisme rencontre encore de nos jours un succès tel qu’il est, de fait, la morale dominante des sociétés démocratiques, c’est qu’il s’accorde parfaitement avec le relativisme moral et le subjectivisme. Au contraire, la morale kantienne, en construisant ses principes a priori peut prétendre à définir des valeurs éthiques objectives, car valant universellement. On peut d’ailleurs remarquer que certaines des règles morales communes à toutes les sociétés se peuvent déduire assez aisément de l’impératif catégorique kantien, ainsi de l’interdit du meurtre, de la condamnation du mensonge, de la nécessité de respecter la parole donnée, etc. Pour être pleinement convaincu, il faudrait encore montrer que l’impératif catégorique peut être pensé indépendamment de l’édifice d’ensemble de la philosophie de Kant. En effet, s’il découlait seulement de la philosophie transcendantale, on pourrait n’y voir que le résultat d’une conception métaphysique particulière et non un principe valant objectivement et, par conséquent, on serait ramené à notre problème de départ. Dans des directions différentes, Apel, Habermas ou Tugendhat nous donnent de bonnes raisons de penser qu’on peut séparer la raison pratique de son fondement transcendantal. Mon Morale et justice sociale s’aventure sur cette même voie.

Mais il est une deuxième difficulté, déjà soulevée par Hegel. Les valeurs éthiques ne sont pas seulement des principes abstraits mais doivent être effectives. Ce qui suppose qu’elles ne sont pas seulement des interdits mais aussi des moyens, pour l’individu, de réaliser ses fins propres. Rousseau qui, à bien des égards, est le précurseur le plus direct de Kant, croyait qu’on pouvait aimer la vertu et que cette passion serait suffisamment forte pour contrebalancer nos autres passions. Posons encore le problème autrement. En suivant Rawls, on affirme la priorité du juste sur le bien, mais comment cette priorité pourra-t-elle s’imposer si les individus – sous le voile d’ignorance ou non – n’y voient pas aussi la réalisation de leur bien le plus précieux. Autrement dit, pour être assuré qu’il existe des valeurs éthiques objectives, il ne suffit pas de s’en remettre aux raisons procédurales du disciple de Kant ou de Rawls. Encore faudrait-il les appuyer sur des fondements anthropologiques. Par exemple, si on admet comme pertinente la description de l’homme comme homo œconomicus ou encore celle de David Gauthier qui en fait un " maximisateur " rationnel, on voit mal comment un tel individu pourrait défendre la priorité du juste sur le bien. Inversement, si on pense que les affects peuvent être aussi, voire plus efficaces que le calcul égoïste, alors on pourra imaginer que les individus trouvent leur bonheur autant dans le travail bien fait que dans l’argent que rapporte ce travail, ou encore qu’ils préfèrent vivre dans une égalité conviviale – même frugale – plutôt que dans la solitude glacée de la compétition économique.

Notre problème pourrait peut-être trouver une solution si on parvenait à combiner de manière convaincante deux traditions philosophiques que tout semble opposer, celle de Kant et celle de Spinoza, une éthique normative et une éthique descriptive. Dans l’Éthique, Spinoza écrit, comme allant de soi : " Le bien qu’appète pour lui-même quiconque est un suivant de la vertu (qui sectatur virtutem), il le désirera aussi pour les autres hommes, et cela d’autant plus qu’il aura acquis une connaissance plus grande de Dieu. " (4e partie, proposition 37) Pour Spinoza, la vertu consiste à rechercher son utile propre, mais voilà que cette recherche débouche sur une formule qui n’est pas bien éloignée de celle de l’impératif catégorique. Pourtant, chez Spinoza, cette formule n’est pas un pur devoir être ; elle s’appuie au contraire sur une espèce de loi psychologique indiscutable : rien n’est plus précieux pour l’homme qu’un autre homme, et l’imagination d’une communauté vivant dans la paix et la concorde est toujours une idée qui nous remplit de joie. Si donc la véritable moralité peut espérer s’imposer, c’est parce qu’elle trouve sa force dans des affects joyeux stables.

Nous sommes confrontés à deux nihilismes. Le premier nihilisme atteint ceux qui, animés par le phantasme de mort, veulent détruire non seulement la société occidentale, mais l’humanité elle-même. En face, nous avons le nihilisme hédoniste défendu par le néolibéralisme, celui qui prétend que l’ère de la domination du consommateur sur le politique est arrivée, ainsi que le soutient le PDG de Videndi Universal, M. Messier. Face à ces deux nihilismes, la tâche philosophique de repenser l’objectivité de l’éthique, de redéfinir des valeurs que tous peuvent partager, n’est pas seulement un exercice intellectuel mais aussi une urgence politique.

Denis Collin - Novembre 2001

jeudi 1 mars 2001

Un être de raison.

Un être de raison. Critique de l'homo oeconomicus (Syllepse - 2000) par Tony Andréani

La théorie économique standard, avec ses multiples prolongements, repose sur une conception générale de l'homme, une véritable anthropologie. “ Au bout de la série des homo, l'homo œconomicus apparaît comme la figure accomplie de l'homo sapiens sapiens. ” C'est cette conception que Tony Andréani soumet à une critique serrée dans son dernier ouvrage, Un être de raison. Alors que le débat en sciences économiques se limite le plus souvent à des variantes autour d'un noyau commun de propositions non questionnées, Tony Andréani s'attaque au modèle qui sous-tend les doctrines économiques dominantes depuis un siècle, un modèle qu'on peut faire remonter en effet à Walras et à Pareto et à l'utilitarisme anglais. Refusant de s'en tenir aux protestations moralistes qui réfutent ce modèle pour ses conséquences inacceptables, par exemple inégalitaristes, Tony Andréani le prend au sérieux, c'est-à-dire qu'il l'étudie comme un modèle censé permettre une compréhension scientifique de la réalité sociale. Donc sa critique va précisément chercher à montrer que les promesses ne sont pas tenues et que le champ de validité de la conception de l'homme comme homo œconomicus est extrêmement restreint. Qu'est-ce donc que cet homo œconomicus ? C'est un individu radicalement “ déraciné ”, c'est-à-dire conçu en dehors de ses attaches sociales[1]. Cet individu est doté de préférences subjectives qui lui viennent de sa constitution physiologique et de son éducation. Il a des besoins illimités qu'il peut satisfaire par une accumulation de richesses mais les besoins décroissent au fur et à mesure que la richesse s'accroît. Enfin, notre individu-type agit rationnellement pour atteindre ses buts. L'homo œconomicus est typiquement compréhensible par les théories de l'action rationnelle qui supposent que l'acteur a toujours de bonnes raisons d'agir. Il n'est pas question de critiquer ce modèle en raison des simplifications qu'il introduit : aucune science n'est possible sans ce type de simplification qu'on peut ensuite enrichir à volonté pour rapprocher la modélisation théorique de la réalité concrète. Et, de fait, le modèle homo œconomicus a été complété, révisé amélioré.

La critique de Tony Andréani porte sur les questions épistémologiques centrales pour les sciences humaines. On peut la résumer ainsi :
(1) La théorie de l'action rationnelle est fondamentalement non réaliste, quelles que soient les sophistications qu’on a pu lui apporter. “ Cela ne veut pas dire qu’il n’y ait rien de tel qu’une action rationnelle mais plutôt qu’il n’existe que des séquences d’action rationnelle se détachant sur un fond d’irrationalité. ” (page 42)
(2) Le modèle de l'homo œconomicus n'est pas descriptif mais normatif ; normatif du point de scientifique dans la mesure où il tend à exclure toute autre démarche ; normatif sur le plan idéologique, en ce qu’il incite le sujet “ normal ” à se comporter comme un calculateur rationnel.
(3) les sciences sociales basées sur ce modèle échouent à penser la différence entre les deux grandes sphères de la vie humaine, la sphère des activités de travail et celle de la consommation et des loisirs, reprenant la distinction que fait Marx (Capital, livre III, conclusion) entre la sphère de la nécessité et le “ royaume de la liberté ”.
Après une présentation du modèle, le travail de TA se déploie successivement à travers quatre moments :
(1) Une critique psychologique qui montre avec précision la faiblesse des conceptions psychologiques des utilitaristes, singulièrement de leurs conceptions du plaisir et du rapport entre travail et peine d'un côté, plaisir et consommation de l'autre. TA montre l'incapacité des théories du choix rationnel à rendre compte de l'irrationalité irréductible de nombreux comportements humains.
(2) Une critique sociologique axée sur l'opposition entre la conception holiste de la sociologie classique et l'individualisme méthodologique de la théorie économique standard. Tony Andréani chez à dépasser cette opposition en montrant que le noyau rationnel du modèle standard tient au caractère “ rationalisant ” des activités de travail. Si “ l'individualisme méthodologique […] est une approche incontournable ”, celle-ci, pour être opérante, suppose que “ l'on connaisse déjà le sens de la place d'un groupe ou d'une organisation dans l'ensemble du champ social, et dans le champ des rapports sociaux en particulier ”.
(3) Une critique socio-psychologique qui s'appuie sur une compréhension de la manière dont les pulsions sont réinvesties dans la sphère du travail. S'appuyant sur la relecture par Gérard Mendel de la théorie analytique, Tony Andréani montre l'effet des rapports sociaux dans la genèse et la structure des passions.
(4) Une critique éthico-politique qui part de l'exposé des contradictions de la philosophie morale et politique du libéralisme. En particulier, Tony Andréani montre comme les théories égalitaristes de la justice (par exemple celle de Rawls) dans la mesure où, sur le fond, elles partagent les présuppositions de l'homo œconomicus, sont en réalité incapables de donner une alternative cohérente aux conséquences les plus insupportables de la conception utilitariste économiste. TA nous donne ici de nouveaux développements sur les questions qu'il avait déjà abordées dans son Discours sur l’égalité parmi les hommes[2]. Entre l'égalitarisme libéral, qui s'accommode finalement des plus grandes inégalités et une égalitarisme absolu qui n'est ni possible ni souhaitable, TA estime que la justice suppose d'abord l'égalisation des conditions essentielles pour l'autonomie personnelle. La critique des thèses de Amartya Sen[3], concernant l’égalité des “ capabilités ” ou celle de Ronald Dworkin[4] sur l’égalité des ressources, est amorcée et invite à des approfondissements.
Ressaisissant la pensée de Marx, TA montre que, correctement réinterprétée, elle écarte à la fois le holisme sociologique et les interprétations analytiques du type de celle de Roemer. Retour sur la pensée de Marx qui est indispensable. Si, comme le dit Tony Andréani, l'homo œconomicus doit fait place à l'homo socius, à l'individu social, “ qui se différencie et s'épanouit dans et par la socialité ”, l'épanouissement de cette individu nécessite la critique théorique et pratique du capitalisme, “ système social foncièrement irrationnel, alors même qu'il a développé et utilisé des outils de rationalité. ” C’est par là que le travail de TA s’articule au présent. L’idéologie du “ tout marché ” et de l’individualisme libéral sert un régime social mortifère. Et si la question reste en suspens de savoir si se constitueront “ des groupements assez forts pour contrebalancer cette dynamique ”, des travaux comme cet Être de raison contribueront sans doute à lui donner une réponse.
Denis Collin – Mars 2001

[1] Le plus radical des philosophes sur néolibéralisme, Robert Nozick, affirme que “ les hommes mènent des existences séparées. ”
[2] Tony Andréani, Marc Ferey : Discours sur l’égalité parmi les hommes, L’Harmattan, 1993
[3] D’Amartya Sen, voir par exemple Repenser l’égalité, Seuil, 2000
[4] Les conceptions de Ronald Dworkin sont reprises et développées dans son dernier ouvrage, Sovereign virtue – The Theory and Practice of Equality. Harvard University Press, 2000

lundi 20 juin 1994

Jankélévitch et la morale

Tous les livres de Jankélévitch tournent autour de la morale. Et pourtant on peut se demander s’il n’y a pas d’œuvre philosophique aussi peu moralisatrice que la sienne. Les « paradoxes de la morale » et non la morale elle-même en constituent le fonds. Or ces paradoxes démontrent l’impossibilité d’écrire un traité de morale. Son traité des vertus conduit à l’impossibilité de définir la vertu et à l’extrême difficulté d’être vertueux. Dans l’élan de la bonne action, Jankélévitch nous met sous le nez le calcul sordide qui s’y cachait. Pascal et La Rochefoucauld sont souvent cités et ce n’est pas par hasard. Les moralistes français aiment à peindre noir sur noir et loin que cette peinture conduise à un cynisme de bon aloi, elle taraude la bonne conscience. L’homme n’agit pas pour atteindre un souverain bien qui serait défini en soi mais c’est au contraire l’action elle-même qui est bonne ou mauvaise. Or le souverain bien donne lieu à des tartines de philosophie ou de théologie, alors que le moment de l’action échappe par définition au verbiage du philosophe. Contradiction que la philosophie des professeurs a du mal à admettre, car elle ne peut se faire à l’idée qu’il y ait un «tout autre ordre» que celui de la philosophie, car les autres ordres sont par construction des sous-chapitres et des sections de la discipline architectonique qu’est la « science philosophique », telle que l’a instituée la philosophie systématique allemande. Il est d’ailleurs à remarquer que la philosophie devient système à peu près au moment où elle devient une institution universitaire. Après Kant et Hegel, il n’y a pratiquement plus aucun philosophe qui ne soit d’abord un professeur de philosophie, bien assis sur sa chaire. Jankélévitch, grand professeur s’il en fut, se situe délibérément à l’écart de cette tradition. Il ne cite presque jamais les grands philosophes allemands. Kant un peu, parfois Leibniz, Hegel presque jamais. Seul Nietzsche a encore droit de cité dans le « Traité des vertus ». Par contre Platon et les grands mystiques, l’Ancien Testament et l’évangile constituent les références citées, analysées, décortiquées de ce travail. Or la pensée de Jankélévitch est parfaitement éloignée d’une pensée théologique. Beaucoup plus en tout cas que la pensée des grands rationalistes qui passent leur temps à définir Dieu.
Jankélévitch aborde de nombreuses questions. Parmi celles-ci, deux me semblent devoir être relevées. Celle de l’eudémonisme d’abord ; celle du rapport entre la fin et les moyens ensuite. Considérons d’abord le problème de l’eudémonisme. Aristote définit le bonheur comme but de l’action morale. Être vertueux conduit au bonheur, à un bonheur qui n’est pas défini de manière univoque, à un bonheur dont il existe des gradations et qui culmine dans le « souverain bien » qu’est la contemplation de l’Un. Les moyens d’atteindre le bonheur sont de deux ordres : l’ordre de la science qui conduit au vrai et celui de la prudence qui guide l’action pratique. D’une manière ou d’une autre la plupart des philosophes adaptent un point de vue proche. Les chrétiens ne prônent pas l’action désintéressée puisque le Souverain Bien leur est promis dans l’autre monde, dans le Paradis qui est la nouvelle forme du souverain bien. La morale des philosophes modernes, celle de Hobbes ou celle de D’Holbach renonce à la théologie et tente de se justifier par l’utilité générale, dans le calcul d’une optimisation du bonheur social qui doit être fondé sur la justice. Mais précisément Jankélévitch montre que la justice ne suffit pas, qu’elle n’est pas en elle-même la morale, que l’égalité arithmétique ou géométrique doit être dépassée par l’équité qui est toujours une justice portée aux limites de l’injustice et forme l’un des intermédiaires entre la justice et l’amour. Si les classiques font de la justice la  par excellence, Jankélévitch montre au contraire son caractère ratatiné, uniquement mathématique, et en fin de compte plus esthétique que proprement éthique.
Avant la légalité, il y a toujours l’illégalité du commencement, illégalité vitale qui, étant la première injustice, fait démarrer l’ordre juridique lui-même ; et la justice ingrate renie ses propres origines quand elle punit cette initiative arbitraire et violente d’où elle est issue.[1]
La justice, même proportionnelle, reste au fond la loi du talion. « Ne fait pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’autrui de fasse » – maxime qui résume selon Hobbes les principes de la  – n’est qu’une version améliorée de ce « donnant-donnant » qui fonde l’utilitarisme.
Même Kant, avec son impératif catégorique finit par justifier, non pas du point de vue de la raison pure mais du point de vue la raison pratique sa métaphysique des mœurs en expliquant que si l’action ne doit pas être motivée par l’intérêt, elle est malgré tout la seule manière humaine d’atteindre le souverain bien. Ainsi Kant écrit : « dans la loi , il n’y a pas le moindre principe pour une connexion nécessaire entre la moralité et le bonheur qui lui est proportionné. »[2]
Néanmoins, si la  n’est pas la doctrine qui nous enseigne comment nous devons nous rendre heureux, elle est cependant celle qui nous dit « comment nous devons nous rendre dignes du bonheur »[3]. Autrement dit, la critique radicale de Kant finit, même si c’est sous une forme atténuée, par rejoindre les morales eudémonistes, dans leur version chrétienne. Et c’est pourquoi la  se trouve rationnellement justifiée dans l’intérêt de la raison. On peut d’ailleurs noter que le ver était dans le fruit, car le principe de l’impératif catégorique, « agis comme si tu voulais que la maxime de ton action soit une maxime universel » est la formulation positive, universaliste, et pour tout dire convenablement déguisée par la métaphysique allemande, de l’utilitarisme franc de Hobbes.
Or Jankélévitch met en cause fondamentalement ce lien, même atténué entre la moralité et le bonheur. Il dénonce impitoyablement la « bonne conscience », qui est le comble de la mauvaise foi, de celui qui se complairait, ne serait-ce qu’un instant, dans la contemplation de sa propre moralité. Or agir pour être digne du bonheur, c’est déjà juger sa propre moralité à l’aune d’une récompense promise. C’est l’exemple de l’ascète qui se prive pendant vingt ans et qui pour succomber une seconde à la tentation d’un beau gâteau, mérite l’enfer, le mérite bien plus que le gourmand qui pêche chaque jour sans essayer de donner des leçons de . Alors que les philosophes donnent le bonheur comme but ou comme récompense de l’action , Jankélévitch fonde la  sur l’amour, sur un amour qui n’est pas « motivé », qui ne se justifie pas par l’aimé, mais sur un amour qui est l’acte fondamental par lequel l’ego sort de lui-même dans la reconnaissance de l’autre, du «tu» dans son indépendance et sa liberté absolue. A la quête de la substance du bonheur, Jankélévitch substitue l’acte et du même coup la vérité éternelle réside non dans un état mais dans la fine pointe de l’instant.
De la même manière sur la question des rapports entre la fin et les moyens, Jankélévitch inverse les termes des apories classiques. L’impératif catégorique est soumis à une critique en règle dans son purisme. Jankélévitch dénonce la haine et fait de l’amour la  cardinale, mais l’amour n’empêche pas de combattre les méchants, de les combattre sans haine, mais sans nécessairement être trop précis et trop finassier sur les moyens. Le pieux mensonge a sa place dans l’action  comme le dynamitage des trains dans la résistance aux nazis. Jankélévitch ne nous laisse pas en paix. Notre époque, avec son «mal absolu» qu’a représenté le nazisme, ne laisse plus aucune place aux certitudes de la philosophie classique. Se réfugier dans les morales hellénistiques (épicurisme ou stoïcisme) ou dans l’impératif catégorique kantien, c’est se condamner à l’égoïsme ou à la mauvaise foi.
La philosophie de Jankélévitch nous place devant une contradiction fondamentale qui est d’abord la tension dans laquelle nous vivons et à laquelle les systèmes cherchent à échapper. Dans le détail nous ne sommes pas libres, comme dans le détail la pensée peut s’expliquer intégralement sur le mode des neurosciences version Changeux. Mais globalement nous sommes libres et nous avons un esprit qui n’est pas réductible au fonctionnement d’une machine perfectionnée. Biologiquement, tant que l’homme est considéré comme objet de la science, le principe de Hobbes – qui n’est d’ailleurs que celui d’Aristote – est une évidence : l’être tend à persévérer dans son être, et cette pulsion naturelle fondamentale, ce «conatus», suffit à expliquer pourquoi nous vivons en société et pourquoi nous avons, le plus souvent, des conduites à peu près morales en temps ordinaires et pourquoi les passions sont toujours prêtes à se déchaîner. Mais à partir du moment où nous agissons, où nous sommes sujets ou subjectivités, l’action est libre de toute détermination et ne se fonde que sur ses propres exigences et non plus sur une relation mathématique entre la fin et les moyens.[4] La philosophie classique suppose la dualité de l’objet et du sujet et l’hypostasie dans le fameux problème de la connaissance et de l’adequatio rei et intellectu. Mais elle pose la subjectivité dans un homme abstrait, réduit à un pur esprit auquel elle oppose l’objectivité de l’être. Alors qu’en réalité cette dualité est la tension même sur laquelle est fondée l’esprit humain. Je suis à la fois le sujet, en tant que je suis moi, individu individualisé au milieu de mes semblables et objet en tant qu’être générique, en tant qu’occurrence de la classe des humains. Ou plus exactement je suis sujet s’objectivant dans la pratique humaine. Or, dans bien des cas, cette objectivation, qui est aliénation, est aussi la source de la jouissance égoïste et le moyen de la conservation de la puissance. C’est cette contradiction que Marx nomme du nom d’idéologie.
Chose intéressante, Jankélévitch consacre un chapitre à l’examen des scrupules kantiens et socialistes contre la charité. Il montre justement que le socialisme ne réfute pas l’action , mais dénonce uniquement la tartufferie de la charité des possédants mais que cette dénonciation suppose la revendication d’une  supérieure qui est celle qu’expose Jankélévitch – ce marcheur infatigable de la gauche :
… ces critiques atteignent surtout une pitié hypocrite et complaisante qui est le contraire même de l’amour. La justice socialiste n’a jamais prétendu rendre l’amour inutile : elle le purifie plutôt de toute charlatanerie et de tout pharisaïsme.[5]
Mais Jankélévitch ajoute :
La justice ne rendra pas la grâce inutile, parce que si rien ne remplace la justice, rien non plus ne remplacera l’irremplaçable amour, même dans le royaume de la justice tout le monde aurait encore besoin de gentillesse et de générosité.[6]
Et ce n’est pas seulement un principe pour demain, mais une dialectique à l’œuvre dès maintenant puisque la bonté et la charité se transforment en justice et en nouveaux droits.
Les impératifs pas catégoriques et même pas toujours impératifs de Jankélévitch se révèlent ainsi bien plus pratiques que les doctrines morales prêtes à l’emploi qui retrouvent tant de faveurs de nos jours (cf. supra). La difficulté vient qu’on ne peut pas faire de résumé de la «doctrine» de Jankélévitch. Après l’avoir lu, il ne reste qu’à penser par soi-même, c’est-à-dire à mettre en cause toujours les principes assurés de la bonne conscience.
(Juin 1994)

Communisme et communautarisme.

Par  Carlos X. Blanco Le communautarisme de Costanzo Preve se démarque de tout mouvement intellectuel nostalgique qui cherche à rétrograde...