Estelle Ferrarese, Le marché de la vertu. Critique de la consommation éthique, Librairie philosophique Jean Vrin, 2023
Ces théories du commerce éthique commencent par étendre la
vertu au marché. On peut mesurer la vertu de chacun, grâce au commerce
équitable et même comparer à l’aune commune qui est l’argent, les vertus et les
vices. En second lieu, le commerce équitable s’inscrit complètement dans la
logique de l’individualisme du marché : c’est l’individu qui est responsable
de ses choix et les ressorts systémiques de la destruction de la nature sont
ainsi escamotés. En particulier, quand les fameux choix éthiques entrainent des
conséquences catastrophiques – par exemple la vertueuse et très chère voiture
électrique induit de nouvelles formes d’exploitation et de destruction de la
nature. Le propos de l’auteur n’est pas de fournir des données empiriques, mais
tout cela commence à être bien documenté. Le très chic quinoa bio contribue à
ravager les terroirs de sa production en Bolivie… Les effets pervers de la consommation
vertueuse échappent au consommateur responsable. Enfin la consommation éthique
propage un style de vie adapté au capitalisme.
L’auteur se défend de faire de la consommation éthique une
tromperie du capitalisme. Dans les motivations des individus, il y a sans aucun
doute une aspiration sincère. Mais la consommation éthique est « au service
du régime d’objectivité que déploie l’échange ». Elle remplace l’analyse du
mode de production capitaliste par une psychologie : il faudrait combattre
« l’humeur prédatrice généralisée » et « un envoûtement par les
marchandises ». En fait, les consommateurs ont beau faire assaut d’éthique,
le marché ne l’est pas plus pour autant. Conclusion sans appel : « la
consommation éthique co-produit l’être humain dont le capitalisme contemporain
à besoin.
Un livre à lire et à discuter, donc.
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