RÉVOLUTION ET TRADITION : Contrairement aux affirmations brutales sur la «suppression de la philosophie» et aux interprétations trop rapides de l'’énigmatique onzième thèse sur Feuerbach, je suis persuadé que ce que Marx nomme «communisme» n’est rien qu’une reprise particulière, dans les conditions nouvelles du développement du mode de production capitaliste, de l’'idéal émancipateur de la pensée philosophique rationaliste, cet idéal qui sans doute prend sa source chez Platon et Aristote, mais que le XVIIe et le XVIIIe siècle porteront à ses plus hauts sommets dans la culture européenne et dont les grands noms sont Descartes, Spinoza, les philosophes français des Lumières, (singulièrement Diderot et les matérialistes), Rousseau, Kant ou Hegel. Je voudrais expliquer ici, pour les lecteurs de Carré rouge, pourquoi, selon moi, si nous voulons revivifier le courant de pensée issu de Marx, si nous voulons tirer sérieusement et sans concessions le bilan d’un siècle de mouvement ouvrier plus catastrophique qu’exaltant, si nous voulons penser les conditions d'’une perspective communiste pour notre temps, alors nous devons retravailler dans cette tradition philosophique. Plus : face à la montée de nouvelles formes d’obscurantisme et à la domination insolente et mutilante de l’idéologie bourgeoise dans la culture, notre tâche est de défendre cette tradition. Enfin, comme nous avons rompu avec le mode de pensée sectaire qui a fait tant de ravages, comme nous ne prétendons plus à la vérité absolue, nous devons nous confronter avec la pensée de ceux qui, à partir de prémisses et d'’une histoire radicalement différente de la nôtre, essaient de définir ce que serait une société juste et quel sens il faut donner aux mots d'’égalité et de démocratie. Je crois que nous avons à apprendre des traditions nonmarxistes ou «post-marxistes».
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[Cet article est paru pour la première fois dans la revue Carré Rouge, en janvier 1999.]