mardi 26 février 2019

Épineuses questions de morale

Face à la folie de notre époque, nous sommes parfois pris de vertige. Quand Science et Avenir annonce l’arrivée proche de bébés OGM aux capacités cognitives augmentées, on se dit que « le meilleur des mondes » est arrivé. Mais la question qui suit est très ennuyeuse : au nom de quel principe pouvez-vous condamner ce type d’expérimentations qui nous permettrait d’améliorer l’espèce humaine ? Comment ne pas constater que sur les autres questions qui se posent aujourd’hui avec acuité dans le domaine de la procréation, des biotechnologies, du début et de la fin de la vie, nous sommes désarmés moralement, c'est-à-dire que nous avons beaucoup de difficultés à trouver des critères sûrs qui pourraient nous permettre de trancher, de dire ceci est bon, ceci est permis ou ceci est interdit.
Nous ne pouvons plus guère en effet nous référer aux sources traditionnelles de l’autorité morale, qu’elles résident dans la tradition de la communauté politique à laquelle nous appartenons ou dans l’autorité religieuse. En héritiers des Lumières, nous croyons au développement de l’autonomie, c'est-à-dire à la puissance souveraine de la raison en tant qu’elle est la raison pratique qui doit déterminer notre volonté et nous rejetons les morales hétéronomes, c'est-à-dire les morales reposant sur un commandement extérieur. Mais ce que la raison nous dicte est loin d’être toujours clair et univoque. Comment argumenter sérieusement en ces matières ?
On pourrait être tenté de se référer à une morale naturelle, quelque chose que nous reprendrions chez Aristote et chez les Stoïciens. « En toutes choses, suivre la nature » : voilà un précepte qui a le mérité de la clarté. Il nous permettrait de séparer le bon grain de l’ivraie, ce qui est conforme à la nature et ce qui est contre-nature. Hélas, nous avons appris qu’il n’en est rien ! Le stoïcisme romain (pour aller vite), celui de Sénèque, d’Épictète et de Marc-Aurèle, celui qui va retrouver ses lettres de noblesse à l’âge classique, est un stoïcisme bien rasé et bien peigné, tout à fait présentable dans la bonne société et en particulier dans la bonne société chrétienne, mais le stoïcisme réel, le stoïcisme grec qui s’enseignait en ce lieu d’Athènes nommé la « stoa » (le portique) était d’une autre nature – si j’ose dire. Il prenait tout à fait au sérieux l’idée de loi naturelle et en tirait toutes les conséquences. L’idée d’une communauté de tous les hommes qui étaient donc frères d’une certaine manière les conduisit à mettre en cause l’esclavage. Mais la communauté des hommes avec les autres êtres vivants allait également de soi et c’est ainsi que certains auteurs de cette tradition trouvaient également naturels les rapports sexuels entre les hommes et les bêtes. Il est donc assez douteux de suivre la nature au sens stoïcien.
Pendant longtemps, l’homosexualité fut condamnée comme « contre nature » : la nature n’avait-elle pas destiné les organes sexuels à la reproduction de l’espèce et dès lors les rapports sexuels entre personnes du même sexe ne pouvant jamais, même potentiellement, être orientés vers la procréation, ils étaient clairement opposés à la nature. Pour réfuter ce point de vue, il faut réfuter l’idée d’une morale naturelle et admettre que la morale dépend des conventions humaines que l’on peut changer à volonté. C’est pourquoi les défenseurs de la cause LGBT se réfèrent, à l’appui de leurs revendications, à de nombreux exemples de sociétés dans lesquelles les pratiques homosexuelles sont admises voire, dans certains cas, encouragées, ce qui prouverait qu’elles ne sont pas vraiment « contre nature » ! Cette première stratégie peut d’ailleurs, assez paradoxalement, s’appuyer aussi sur le recours à la nature : l’éthologie a montré de nombreux exemples de comportements « homosexuels » chez les animaux, notamment chez les primates mais pas seulement et donc elle est aussi naturelle que les relations hétérosexuelles.
L’argument selon lequel un comportement devrait être toléré parce que l’on en trouve des exemples dans la nature n’est évidemment pas très convaincant. De nombreux animaux tuent une partie de leurs petits quand les portées sont trop nombreuses. En déduira-t-on que l’infanticide peut être autorisé ? Au motif que les chiens mangent souvent des excréments, faut-il renoncer à classer la coprophilie au rang des perversions ?
On voit donc que les arguments « naturalistes » ne sont guère convaincants, ni dans un sens ni dans un autre. Des prétendues lois naturelles, on ne peut rien tirer quant aux obligations que devraient suivre les humains. L’interdit de l’inceste ne peut se fonder sur la nature puisque nous n’avons aucune répugnance naturelle envers l’inceste, sinon l’interdit serait inutile. De l’éthologie, on ne peut non plus conclure que certains comportements devraient être autorisés. Il n’est pas des plus pertinent de justifier l’homosexualité humaine en alléguant celle des chimpanzés !
À ceci on pourrait ajouter un argument « sadien ». Dans La philosophie dans le boudoir, Sade reprend au pied de la lettre le principe stoïcien « en toutes choses, suivre la nature » mais il en tire des conclusions assez désagréables. Les vertus prônées par la morale ordinaire sont contre nature : « renoncez aux vertus, Eugénie ! Est-il un seul des sacrifices qu’on puisse faire à ces fausses divinités, qui vaille une minute des plaisirs que l’on goûte en les outrageant ? Va, la vertu n’est qu’une chimère, dont le culte ne consiste qu’en des immolations perpétuelles, qu’en des révoltes sans nombre contre les inspirations du tempérament. De tels mouvements peuvent-ils être naturels ? » s’écrie Dolmancé. Et d’ailleurs « si la nature défendait les jouissances sodomites, les jouissances incestueuses, les pollutions, etc., permettrait-elle que nous y trouvassions autant de plaisir ? » Mais le meurtre lui-même est conforme à la nature ! « La destruction étant une des premières lois de la nature, rien de ce qui détruit ne saurait être un crime. Comment une action qui sert aussi bien la nature pourrait-elle jamais l’outrager ? Cette destruction, dont l’homme se flatte, n’est d’ailleurs qu’une chimère ; le meurtre n’est point une destruction ; celui qui le commet ne fait que varier les formes ; s’il rend à la nature des éléments dont la main de cette nature habile se sert aussitôt pour récompenser d’autres êtres ; or, comme les créations ne peuvent être que des jouissances pour celui qui s’y livre, le meurtrier en prépare donc une à la nature ; il lui fournit des matériaux qu’elle emploie sur-le-champ, et l’action que des sots ont eu la folie de blâmer ne devient plus qu’un mérite aux yeux de cette agente universelle. C’est notre orgueil qui s’avise d’ériger le meurtre en crime. »
Bref la nature n’est vraiment pas le guide que nous cherchions, à moins de nous convertir à la morale de Dolmancé ! Sans doute n’était-ce pas le but premier de Sade mais La philosophie dans le boudoir apparaît comme une réfutation apagogique du précepte stoïcien !
Mais d’un autre côté, on ne peut guère soutenir que la loi positive suffit pour définir les limites du licite et de l’illicite et qu’il y aurait donc dans le droit quelque chose de totalement arbitraire – pour reprendre l’argument de Cicéron, pourquoi le brigandage ne peut-il être autorisé ? Pour sortir de ce dilemme, il suffit de partir de la proposition de Marshall Sahlins selon qui la nature humaine, c’est la culture. Ainsi ce que nous appelons « contre nature » peut-il se résumer à ce dont nous craignons qu’il détruise la société. Le meurtre et le brigandage ne peuvent être autorisés, non parce qu’ils seraient « contre nature » mais tout simplement parce qu’ils sont incompatibles avec le maintien de la vie sociale.
Le problème est maintenant que nous sommes confrontés à une multitude de formes différentes de culture et de vie sociale avec des impératifs moraux souvent très différents. Le noyau moral commun à toutes les sociétés, la règle d’or, est lui-même très flou. Faire aux autres ce que nous voudrions qu’on nous fît : soit, mais encore ? Le spectre des choses que nous voudrions qu’on nous fît est étendu à l’extrême et varie souvent d’un individu à l’autre. Ne pas faire aux autres ce que nous ne voudrions pas qu’on nous fît : c’est également quelque chose d’assez vague. En suivant cette piste et nous en tenant au point de vue purement logique, nous sommes entraînés dans d’épouvantables discussions sophistiques.
Pour sortir de ces dilemmes, il semble que nous devrions mieux cerner le champ de nos réflexions et adopter un certain nombre d’axiomes. Ces axiomes ne sont pas intemporels et absolument universels, car on peut toujours trouver des sociétés et des cultures qui n’en tiennent aucun compte. Ils sont enracinés dans un lieu et un temps : ce sont les axiomes qui sont présupposés dans les sociétés modernes égalitaires et démocratiques, qui font du respect de la liberté de conscience et des libertés individuelles un principe intangible. Ils définissent une morale commune, généralement acceptées par tous et ils constituent bien une « décence commune » pour reprendre l’expression de George Orwell. On pourrait contester ces axiomes : la liberté n’est peut-être qu’un mot creux et il y a tant de limitations qui s’imposent à la liberté qu’on ne voit plus à quoi sert de s’y référer.  Quant à l’égalité, elle n’est bien qu’une pétition de principe et les êtres humains sont si différents les uns des autres mais aussi si inégaux en force physique, en résistance aux maladies et peut-être en capacités intellectuelles que cette égalité n’est peut-être qu’une abstraction non seulement inutile mais nuisible. À quoi nous ne pouvons répondre de manière définitive par une réfutation en règle !
Nous pouvons nous donner quelques bases simples. De ce que « l’homme est un animal social », chose qui ne peut guère est contestée, nous pouvons déduire avec Grotius une règle d’utilité sociale : « Ce soin de la vie sociale, dont nous n'avons donné qu'une ébauche, et qui est conforme à l'entendement humain, est la source du droit proprement dit, auquel se rapportent le devoir de s'abstenir du bien d'autrui, de restituer ce qui, sans nous appartenir, est en notre possession, ou le profit que nous en avons retiré, l'obligation de remplir ses promesses, celle de réparer le dommage causé par sa faute, et la distribution des châtiments mérités entre les hommes. » D’où il découle que « X. —1. Le droit naturel est une règle que nous suggère la droite raison, qui nous fait connaître qu'une action, suivant qu'elle est ou non conforme à la nature raisonnable, est entachée de difformité morale, ou qu'elle est moralement nécessaire et que, conséquemment, Dieu, l'auteur de la nature, l'interdit ou l'ordonne. » Et par conséquent : « 5. Le droit naturel est tellement immuable, qu'il ne peut pas même être changé par Dieu. »
Ces règles étant admises, nous n’avons pas encore répondu à nos interrogations initiales. Nous devons concéder que la détermination précise de ce qui découle de ces normes communes revient d’une manière ou d’une autre à la délibération publique. Admettons que les individus participent à une délibération publique sur une question quelconque – par exemple celle du suicide assisté, rebaptisé « mort heureuse » (euthanasie) – et que cette délibération conduise à une prise de décision, entérinée par l’autorité politique par exemple, on peut considérer comme Apel ou Habermas que cette délibération contient en elle-même un certain nombre de présuppositions qui entrent en ligne de compte dans le raisonnement logique qui vient appuyer cette décision. Ainsi une délibération publique sur un sujet d’ordre général présuppose :
1)      Que les participants à cette délibération se reconnaissent mutuellement comme des sujets raisonnables, puisque seule l’acceptation commune de l’autorité de la raison rend une discussion possible.
2)      Que les participants se reconnaissent comme des égaux « en droit » et qu’aucun n’ait la possibilité d’imposer aux autres son point de vue, si ce n’est pas la force de son argumentation.
3)      Que l’objet de cette délibération ait une valeur universelle, puisque ce je veux pour moi, je dois nécessairement le vouloir pour les autres et inversement et ce non seulement à un moment donné et compte-tenu de l’opinion présumable de mes contemporains mais encore en présupposant que n’importe qui dans l’avenir pourrait assumer les conséquences de ces choix.
4)      Que les décisions prises préservent au maximum les libertés de chacun de conduire sa vie comme il l’entend.
En acceptant ces présuppositions, on voit qu’aucune norme ne peut impliquer que les humains puissent être traités comme des choses, puisque les humains concernés ne pourraient plus être considérés comme des personnes libres et égales. Personne ne pourrait choisir d’être dans ses caractéristiques essentielles le résultat des décisions d’une autre personne de la même façon que personne ne peut vouloir que l’heure de sa propre mort soit le résultat de la décision d’une autre personne. Ceci n’est qu’une conséquence logique des présuppositions de la délibération visant à élaborer des normes concernant par exemple la possibilité pour un coupe de choisir le sexe de son enfant ou la possibilité du « suicide assisté ». Chaque fois que l’on parle des questions liées à la procréation, la condition (3) implique que l’on se pose en premier lieu la question de la liberté de l’enfant à naître : une personne libre peut-elle vouloir être privée de ses parents « biologiques » ?  Évidemment, il arrive que des enfants soient, pour diverses raisons, privés de leurs parents et soient élevés par des parents « tenant lieu », mais ce n’est pas le résultat d’une volonté mais celui d’un enchaînement de causes qui échappent à la volonté qui devrait être celle de personnes libres. Plus généralement, l’éthique de la discussion interdit toute action qui conduit à la « réification » de l’être humain, précisément parce que cette réification contredit les présuppositions de la délibération publique en vue de fixer les normes éthiques acceptables par l’ensemble de la société. La production de bébés OGM même avec des capacités cognitives améliorées et peut-être surtout avec des capacités cognitives améliorées devrait donc être interdite et toute recherche stoppée.
Il semble que si on suit cette voie, on devrait pouvoir trouver des moyens adéquats pour démêler les questions morales épineuses qui se présentent à nous aujourd’hui. C’est qu’il faudra tenter de faire dans un prochain article.

2 commentaires:

  1. Juste et honnête analyse, mais y-at-il vraiment une possibilité d'y arriver comme cela ?
    D'abord, votre réfutation de la nature comme modèle montre bien la difficulté : à la recherche d'un guide pour répondre aux questions morales, vous déqualifiez la nature au motif que si nous la suivions, elle nous conduirait à des décisions qui nous déplaisent. Vous faites semblant de chercher un guide, mais vous avez déjà la destination. Au passage rappelons-nous que l'infanticide, par exemple, est peut-être naturel mais aussi culturel. De longue date il a fait partie de certaines cultures comme conséquence de nécessités économiques, et aujourd'hui il n'existe aucun argument technique pour différencier un avortement d'un infanticide (je suis en faveur de l'avortement). De même pour l'euthanasie évidemment. Ayant déqualifié la nature car elle ne confirme pas ce qui nous parait aller de soi (ce qui nous parait "naturel") on ne peut que se tourner vers un droit "naturel" qui est celui qui permet la vie sociale. Mais cette opposition n'a pas lieu d'être, la phrase de Salhins est idéologique. Effectuer une véritable généalogie de la morale élimine l'opposition nature/culture et montre que la morale naturelle se développe selon une logique un peu comparable au langage : on ne sait pas ce qu'on va développer mais ça sert toujours plus ou moins à la même chose, assurer une certaine stabilité du groupe sous revue. Il y a effectivement, dans les détails, mille manières de développer ces règles et de les raffiner.
    Du coup votre piste de solution me parait fausse, et d'ailleurs vous l'avez déjà niée implicitement dans la première partie en concluant sans débat sur une série de sujets. Les quatre conditions posées mettent d'emblée les sujets dans le champ du politique, lequel est entièrement dans une logique d'arbitrage, et en dernier ressort les arbitrages portent toujours sur des "intérêts" au sens large, ils sortent de la transcendance qui caractérise les morales. Dans votre texte sur le sionisme publié sur la-sociale vous enfreignez allègrement le point de vue soutenu ici, en affirmant en substance, et comme une évidence absolue, qu'il faut être un abruti pour être antisémite ou homophobe. Ceci viole délibérément les deux premiers principes ici présentés. Personnellement je n'ai rien contre l'homosexualité, mais j'ai certainement quelque chose contre le fait de considérer a priori comme des abrutis ceux qui ont des opinions différentes des miennes. A ce niveau on est loin de la philosophie. L'idée d'un débat philosophique serein sur les questions morales entériné par un politique impartial fait sourire.
    En effet, les deux parties du texte sont une tentative de rationalisation de conceptions déjà arrêtées. Mais arrêtées par quoi ? Pour faire court, la morale ne peut être de l'ordre de la rationalité - même si elle s'y appuie - mais de l'ordre du désir. Quand on dit le Bien d'une chose, on dit son désir de cette chose et, s'il s'agit bien de morale et non seulement d’esthétique, on dit aussi son désir qu’autrui désire la même chose. Mais quels peuvent être ces désirs ? Il y a lieu de distinguer les désirs relatifs à l'individu lui-même et les autres. Dans les "sociétés égalitaires et démocratiques" qui font des "libertés individuelles un principe intangible" le débat moral est plié d'avance : le primat de principe donné aux désirs relies aux intérêts individuels fait que, comme tout le monde le dit et le constate, tout ce qui peut techniquement se faire, finit toujours par se faire, il n’y a jamais de raison suffisante pour l’interdire à jamais. J'adore cette idée de "common decency" mais elle est l'éternelle perdante depuis qu'elle existe, ce concept a été forme pour exprimer une illusion perdue, c’est une nostalgie par construction.
    A SUIVRE

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  2. SUITE
    Pour la sauver (la common decency) il faut avoir le courage, par exemple, d’admettre que "stopper" telle recherche et "interdire" la production de bébés OGM relève d’un comportement autoritaire. A défaut, voilà ce qui se passe : on saisit des comités d’éthique, on a des débats, qui pèsent le pour – le charme des nouvelles possibilités - et le contre – les craintes de dérive « morale » - mais le principe de précaution ne s’applique pas, car il suppose l’échec d’une expertise à prouver qu’il n’y a pas de dangers. Mais une expertise morale, cela n’existe pas. Le principe de précaution devrait ici tout interdire d’office, du coup il est inapplicable et c’est la logique inverse qui s’impose : on ne peut interdire au nom des craintes des uns ce qui comble le désir des autres. Où est ancrée l’idée qu’un enfant qui a des parents non « biologiques » (en passant, c’est le problème de la GPA, pas des OGM) souffre : dans la science qui l’a prouvé, ou dans notre propre désir de parents biologiques ? D’ailleurs, au pire on peut toujours fixer des normes. Autre exemple parmi d’autres : on a facilité le divorce, c'était une extension des libertés individuelles et une étape de l’émancipation de la femme du patriarcat. Que faire de ces cohortes de femmes seules avec enfants, familles pauvres qui vivent mal, et qui n’étaient pas prévues quand on a décidé de cette avancée morale ? Le divorce, on ne cesse de le faciliter. Faudrait-il l’interdire ou le contrôler sévèrement, dès qu’il y a des enfants surtout ? Mais quid alors des libertés ?
    Interdire, arrêter, restreindre, proscrire des comportements sociaux, pourquoi pas si notre conviction est assez forte. Mais proposer cela dans le respect des principes démocratiques et de la liberté économique tels que rappelés est une pure vue de l'esprit, un exercice de style. Tout se justifiera par la liberté de choix et le cas échéant par une compensation financière adéquate. Si on voit une différence entre le salariat ou la domesticité, et la GPA (c’est mon cas) c’est, soit qu’on met une forme de sacré dans le corps et dans l’enfantement – et je suis bien incapable de l’imposer rationnellement dans un débat, même si je pense que le sacre a une base matérielle – soit qu’on prévoit des problèmes psychologiques qui seront créés par la GPA, mais il sera impossible de les sortir du virtuel pour les prouver. On voudra donc combler les désirs individuels qui n’empiètent pas sur les désirs individuels des autres, l’individu est la mesure des deux côtés. L’une désire un enfant pour elle, l’autre désire qu’autrui vive avec des parents biologiques. En démocratie libérale ou l’on part de l’individu c’est tranché d’avance. Améliorer son enfant potentiel par la génétique ? Quel argument contre, sinon religieux et aujourd’hui risible (au mieux).
    Cela rejoint bien des débats actuels et informe une problématique très générale. On a besoin de retrouver une forme de souveraineté perdue certes, mais on n'arrive pas vraiment à dire à quoi elle devrait servir. L'incessant rappel aux principes "démocratiques" est une moraline injectée en continu pendant que tout devient technique et marchandise. Imaginer autre chose...relève encore du désir. Ceux qui veulent autre chose doivent rendre désirable ce qui n'est pas "démocratique" au sens actuel. C'est pour cela, mon cher ami, qu'on tend à vous appeler rouge-brun, et que je serais peut-être appelé brun-rouge si quelqu'un me connaissait. Je n'ai jamais été ni brun ni rouge, j'aime bien le jaune, mais je voudrais composer une couleur qui m’aille vraiment au teint.

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