samedi 19 avril 2025

Sur l"humanisme (III). Renaissance

 La Renaissance et l’humanisme semblent ne faire qu’un. Mais il faut se garder d’aller trop vite dans cette identification ; la Renaissance n’est pas toute humaniste et cet humanisme lui-même a des figures variées. L’humanisme italien et bientôt européen commencerait à l’aube de la Renaissance. Il est déjà désigné sous ce nom par Pétrarque et Boccace. Mais si on s’accorde pour y voir un ensemble de traits culturels et esthétiques relativement homogènes, on a beaucoup de difficultés à isoler un corps de doctrines morales, philosophiques et politiques ayant une consistance certaine. Les études sur l’humanisme renaissant ne manquent pas et on retiendra singulièrement les travaux d’Eugenio Garin. On connaît des approches de la philosophie de la Renaissance – par exemple celle de Maurice de Gandillac dans l’histoire de la philosophie de l’édition de la Pléiade ou celle d’Ernst Bloch[1].

mardi 1 avril 2025

Devenir des machines. Recension

Dans la revue Eléments, avri-mai 2025 n°213:

La technique, espoir ou danger ? On a déjà beaucoup écrit sur ce thème, et ce n'est pas fini. La question majeure, aujourd'hui, est celle du grand remplacement de l'homme par la machine. Comment passe-t-on d'un monde où l'outil prolonge la main à un monde où c'est la main qui prolonge l'outil ? La position critique de Denis Collin, proche de celle de Bernard Charbonneau ou de Günther Anders, est indissociable de son anticapitalisme, et c'est ce qui en fait l'intérêt. « La Machinerie, écrit-il, est le corps du capital et son âme est le fétiche par excellence, l'argent. » La dynamique du capital équivaut en effet au triomphe du «sujet automate », si semblable au marché libéral conçu comme une « société automatique » et autorégulée où les équilibres s'établissent d'eux-mêmes grâce à des mécanismes spontanés. Bien avant L'homme-machine de La Mettrie (1748), la science galiléenne visait déjà à réduire le vivant à ses composants inertes. Tel est aussi l'objectif du transhumanisme, quand il affirme que l'intelligence artificielle (qui n'est en réalité qu'une raison calculatoire : vitesse de calcul + capacité de mémoire) constitue une promesse d'autant plus crédible que le cerveau humain n'est lui-même qu'une machine. La conception machinique de la conscience et de l'esprit telle que la posent les neurosciences aboutit en dernière analyse àexpulser la nature et la vie du monde des humains. La rédemption de l'« homme augmenté » par le métissage neuronal apparaît ainsi comme l'annonce d'une société dominée par une caste nouvelle gonflée d'une volonté de puissance caricaturale qui, bien entendu, se réclame de l'élan faustien pour dénoncer les « romantiques » et les « néo-luddites ». Rappelons que dans le second Faust (acte V), on voit sans surprise Faust se rallier aux méthodes d'exploitation capitaliste.

Il ne faut pas se plaindre d'avoir perdu son âme quand on l'a déjà vendue

Alain de Benoist.

Denis Collin, Devenir des machines : 400 ans de soumission de l'homme à la machine, Max Milo, 319 p„ 21,90€.

  

mardi 25 mars 2025

Sur l'humanisme (II): Antiquité de l’humanisme

Zénon de Kition

La sagesse des Anciens n’est plus, au mieux, qu’un objet d’études pour érudits définitivement dépassés par le mouvement de l’histoire quand il ne s’agit pas d’horribles nostalgiques du patriarcat blanc dont tous les auteurs anciens seraient des archétypes. Le jeunisme est l’attitude la plus généralement défendue dans une époque où le progrès est incontesté et incontestable. Le progressiste est l’homme qui vous dit : avant ne vaut plus rien et ce sera bien mieux après. Selon une anecdote célèbre, Thalès, scrutant les étoiles ne regardait pas où il mettait les pieds et tomba dans un puits. Le progressiste, semblable à Thalès, ne regarde pas à ses pieds et tombe proprement dans un trou après avoir crié « on n’arrête pas le progrès ».

lundi 24 mars 2025

Sur l'humanisme (I) Introduction

Introduction


Dans les années 1960 et 1970, on a entrepris de se débarrasser de l’homme, philosophiquement parlant. Michel Foucault, dans Les mots et choses, annonçait sa disparition, telle sur le rivage une image de sable. La mode était à «l’antihumanisme théorique» et Althusser, à l’époque gourou de la rue d’Ulm, reconstruisait un Marx de son invention, spécialiste des «procès sans sujet(s) ni fin(s)», un Marx créateur d’une nouvelle science, «la science de l’histoire», totalement opposé au «jeune Marx» humaniste. Dans un autre recoin d’une vie intellectuelle fertile en innovations baroques, Deleuze et son ami Guattari détruisaient notre petite cuisine familiale freudienne pour la remplacer par des branchements de «machines désirantes». Ce temps semble lointain, mais, pour une fois, la philosophie n’avait pas fait l’oiseau de Minerve qui ne s’envole qu’au crépuscule (Hegel), mais elle avait poussé le cri de la chouette quand le jour venait tout juste de se lever.

samedi 8 mars 2025

La négation de l’humain


 Si nous voulons comprendre comment les humains, capables d’entendre le message de Confucius, de Bouddha, d’Aristote ou du Christ, sont aussi capables du pire, au point de faire douter de cette espèce humaine si fière d’elle-même, alors nous devons rentrer dans les méandres de la tragédie humaine et restituer, à grands traits, le processus qui conduit à la perte de l’humanité de l’homme.

mercredi 26 février 2025

Devenir des machines: interview dans *Marianne*

 Dans « Devenir des machines » (Max Milo), le philosophe marxiste Denis Collin explore les effets sociaux du développement technologique, de la machine à vapeur à l'intelligence artificielle.

Il y a environ 400 ans, des philosophes comme Francis Bacon ou René Descartes avançaient que le développement des sciences – issu notamment de la révolution copernicienne – et des techniques profiterait au plus grand nombre et guiderait l'humanité vers le meilleur des mondes possible. Pour le penseur français, nous devrions même nous rendre « comme maîtres et possesseurs de la nature ».

vendredi 31 janvier 2025

jeudi 30 janvier 2025

Le caractère sacré de la vie

 

Qu’est-ce qui est sacré ? La démarche de Dworkin


Ronald Dworkin (1931-2013) est un important philosophe du droit américain. Ses livres comme Law’s empire ou Taking rights seriously tentent de sortir des dogmes du positivisme juridique et rétablissent un lien nécessaire entre le droit et les principes moraux. Sovereing Virtue (2000), défend l’égalité dans la même optique que le libéralisme politique rawlsien. Dans Life’s Dominion (1993), il se confronte en tant que « libéral » (américain) aux conservateurs sur les questions de l’avortement et de l’euthanasie.

dimanche 19 janvier 2025

Faut-il vraiment croire dans la politique?

Au soir de ma vie, j’éprouve le besoin de regard un regard rétrospectif sur ce qui m’a grandement occupé pendant plusieurs décennies, à savoir la politique. Ce bilan que je me sens contraint de présenter est aussi largement celui de toute une génération, ceux qui, jeunes en 1968, sont tombés dans le bain « révolutionnaire ». On peut penser que c’est un peu présomptueux de vouloir parler au nom d’une génération et c’est pourquoi je m’en abstiendrai. Ce texte est écrit à la première personne. D’autres pensent et penseront tout autrement.

Sur l"humanisme (III). Renaissance

 La Renaissance et l’humanisme semblent ne faire qu’un. Mais il faut se garder d’aller trop vite dans cette identification ; la Renaissance ...