Cet
ouvrage d'économie politique, qui fait appel, par exemple, à Platon,
Rousseau, Kant, Hegel ou Hannah Arendt, se propose d'éclairer le
fonctionnement du monde économique, social et intellectuel
d'aujourd'hui.
Selon l'auteur, fin du travail et mondialisation,
thèmes majeurs des représentations dominantes de la situation
économique et sociale actuelle, mystifient la réalité. L'idéologie de
la fin du travail est pourtant démentie par la condition de l'homme qui, pour vivre, doit agir
sur la nature, de plus en plus transformée. La dévalorisation
idéologique du travail va de pair avec la baisse de valeur de la force
de travail. Ce qui entraîne du chômage, c'est le progrès technique en
tant qu'il est investi dans le mode de production capitaliste, et non
point ce progrès en lui-même.
Marx
avait déjà compris que le capital appelle un marché mondial. De
l'exportation des marchandises, on est passé à celle des capitaux.
Hiérarchisée, la mondialisation des capitaux s'est autonomisée, se
déconnectant de l'économie réelle, productrice. Au keynésianisme et à
la social-démocratie se substituent une stratégie monétariste et
dérégulatrice et une inflation de capital virtuel. A l'économie réelle
l'auteur oppose le fictif - que nous préférons dénommer virtuel -
et le mythe de l'idéologie. Or, la réalité comporte plusieurs niveaux
et il y a notamment une réalité - et donc une efficience - du virtuel,
de même que de l'illusion et de l'idéologie.
Depuis
trois décennies, l'État est de moins en moins le lieu d'un compromis
entre classes - rôle d'arbitre admis par Jean Jaurès. Il se conforme à
l' "ordre" des marchés, grâce à quoi la cybersociété est censée s'autoréguler - avec, ajoutons-nous, une complexité que ne pouvait atteindre la société des Harmonies économiques de Frédéric Bastiat. D. Collin aurait gagné à souligner que, en vertu
même de son analyse, la mondialisation, au stade actuel, se
différencie fort de ce qu'elle pouvait être avant notre demi-siècle.
Ainsi ce que, aujourd'hui, elle naturalise idéologiquement, c'est la
financiarisation mondiale.
Le
présent ouvrage manifeste que l'économie, comme les autres sciences
sociales et sciences humaines, gagne à consulter la philosophie et à
lui emprunter. Réciproquement la philosophie ne doit-elle pas réfléchir
à partir de ce qui devient son monde ? Son rôle critique ne doit pas
l'enclore en elle-même. En outre, l'éthico-axiologie indique les
chemins de la raison en direction d'un ordre mondial enfin juste.
L'auteur aurait dû proposer des moyens opératoires pour faire reculer
le règne de l'argent en vue du seul dénouement qu'il retienne, la
substitution d'une mondialisation socialiste à la mondialisation
libérale du capitalisme.
Jean-Marc GABAUDE.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire